Coup de tonnerre sur l’assurance-vie, considérée par la justice comme un produit financier comme un autre

2017 pourrait bien être une bien mauvaise année pour l’assurance-vie. Alors que son changement de fiscalité sur les produits issus de l’assurance-vie devrait passer à 30% (au lieu des 23% actuels), suite à la victoire de Mr Macron, voici que la justice change, à son tour, de regard sur ce placement. La Cour de Cassation le considère dorénavant comme un produit financier comme un autre et non plus comme une assurance financière. Les assureurs, courtiers et intermédiaires financiers devraient donc se plier aux règles imposées aux prestataires de services d’investissement pour sa commercialisation, et non plus aux règles plus souples de distribution d’assurances. Si dans les faites, ces règles sont le plus souvent d’ores et déjà appliquées, en justice, la distinction restait encore de mise. Ce n’est plus le cas.

Assurance-vie : un produit financier pour les épargnants, et non pas une assurance !

A sa création, l’assurance-vie était belle et bien une assurance financière reposant sur un aléa : la vie ou la mort de l’assuré à l’échéance du contrat. Avec son développement exponentiel, l’assurance-vie est devenue, au fil des années et des milliards d’euros de collecte, un produit financier comme un autre. L’assurance-vie conservant la plupart des attraits de sa prime jeunesse (fiscalité sur les produits, abattement lors de la transmission), alors que dans les faits, avec la multiplication des unités de compte, des supports immobiliers, ETF, et autres supports à inventer, l’assurance-vie est devenue un pur produit financier.

La multiplication des profils de gestion, de la gestion automatisée des unités de compte, la diversité des unités de compte (des fonds, aux SCPI, en passant par les ETF...), l’assurance-vie n’a plus rien d’un contrat d’assurance avec un simple fonds en euros. L’assurance-vie est devenue un produit financier hyper souple, permettant même de piloter l’allocation des épargnants au fil de l’évolution de leur aversion aux risques.

Dans un jugement récent de la Cour de Cassation de mars 2017, dont l’Agefi s’est fait l’écho ce jour, la Cour a partiellement cassé un jugement de cour d’appel opposant une épargnante, à revenus modestes, une femme de ménage retraitée, à la Caisse d’Epargne. Cette épargnante a subi une moins-value sur son capital placé de près de 24.000€, suite au placement de son capital sur le contrat Nuances, profil dynamique. Dans sa justification, la Cour de Cassation utilise le fait que la Cour d’Appel n’a pas vérifié que la banque avait effectivement suivi toutes ses obligations en la matière de commercialisation de produit financier, et notamment en évaluant l’expérience de l’épargnante en matière d’investissements financiers, actant ainsi de fait, qu’un contrat d’assurance-vie n’est donc rien d’autre qu’un produit financier comme un autre.

Une situation embarrassante pour les assureurs

Les assureurs martèlent à qui veut bien l’entendre que l’assurance-vie reste un véhicule financier à part. Considérer l’assurance-vie comme un produit financier les insupporte. Mais les faits sont là. Les épargnants en souscrivant souhaitent bénéficier des avantages fiscaux de l’assurance-vie, aussi bien sur les produits que lors d’une transmission, mais le considèrent avant tout comme un pur produit financier.

D’un côté les intermédiaires doivent donc redoubler de vigilance avant d’entraîner tout épargnant vers des unités de compte, en s’assurant de leur expérience en matière d’investissement sur les placements à risque, d’un autre les assureurs pourraient également mis en cause pour leur forte incitation à pousser les épargnants vers les unités de compte.

Or les assureurs proposent de plus en plus aux épargnants les plus averses aux risques, ceux qui souhaitent miser uniquement sur des fonds en euros, des conditions de souscription avec une exposition aux unités de compte à risque. De fait, en jouant ainsi avec le feu, en exposant des épargnants averses aux risques, aux unités de compte, les assureurs pourraient bien rapidement se retrouver avec quelques dossiers difficiles à gérer. En effet, il suffirait que les marchés boursiers subissent une forte baisse. Pensant ainsi bénéficier d’un placement au global garanti, avec une exposition modérée aux risques de marché, ces épargnants pourraient découvrir, en cas de mauvaise orientation des marchés, des pertes latentes sur leurs contrats, les renvoyant dans la même situation d’incompréhension que cette épargnante...

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